The financialization iceberg : a transnational and trans-scalar ethnography of debts chains across il-legal markets (Brazil, India, and France)

Type de programme

ANR

Date de début et fin du programme

janvier 2025-décembre 2028

Noms des responsables

David Picherit (PI, et PI du sous-projet "Assembling Debt"), Isabelle Guérin (PI du sous-projet "Converting Debt’), Benjamin Lemoine, PI du sous-projet "Garanting debt"

Résumé

Ce projet explore la financiarisation du capitalisme à travers une étude transnationale des chaines de dettes sur les marchés licites et illicites. Si la financiarisation du capitalisme suscite nombre de préoccupations, seule la partie visible de l’iceberg est souvent appréhendée. La partie immergée est immense et comprend des formes de finance informelles, illégales et illicites extrêmement rentables et aujourd’hui connectées à la finance formelle.

Aujourd’hui les liens financiers, criminels et politiques transcendent les frontières des Etats, les démocraties établies et les économies légales, et atteignent le cœur des marchés légaux et financiers grâce à des activités telles que la consommation et le blanchiment d’argent.

Alors que les recherches sur les liens entre la finance dans les économies illégales, les prêts informels, les microcrédits et la dette publique et les systèmes bancaires font défaut, explorer cette partie invisible de la financiarisation est cruciale pour comprendre les dynamiques contemporaines des sociétés et les inégalités sociales et économiques.

Debtchains explore comment la financiarisation du capitalisme, en tant que mode relationnel d’accumulation économique, est soutenue par des chaînes de dettes micro et macro qui sont façonnées par et constitutive de flux de légalités et d’illégalités, de visibilités et d’invisibilités qui traversent et segmentent les marchés, les acteurs et les pratiques financières.

Au-delà des approches désincarnées et techniques de la financiarisation, ce projet constitue la financiarisation en un objet tangible d’investigation empirique, à travers le prisme des chaines de dettes. Nous considérons que la financiarisation du capital est socialement enracinée, ancrée dans des pratiques, et dans diverses figures qui construisent ces chaînes de dettes.

Nous suivons les acteurs liés par des dettes autour de trois marchés : un produit illégal, la cocaïne entre le Brésil et la France ; deux produits légaux (le bois et les pesticides) en Inde, intégrés aux économies politiques criminelles régionales et mondiales.

Pour explorer les chaines transnationales de dettes de manière ethnographique à travers le Sud global et le Nord global, pour relier les pratiques de dettes des familles à celles institutions financières mondiales, nous nous concentrerons sur trois processus qui opèrent à travers les chaines de dettes

  • Assemblage : comment les protagonistes assemblent-ils des acteurs et des institutions licites et illicites pour façonner des environnements socio-politiques et éthiques favorables à la poursuite de leurs activités ?
  • Garantir les dettes : comment des méthodes de régulation, de garantie et de mise en œuvre pluri-légales et illégales sont-elles articulées ?
  • Convertir l’argent et les biens : comment les acteurs gèrent-ils la visibilité et l’invisibilité, la légalité et l’illégalité, le secret et l’exposition et l’exposition publique des fortunes pour convertir l’argent et les bien en divers actifs tangibles et intangibles ?

Le projet s’appuie sur une combinaison performative de disciplines (anthropologie, sociologie, économie et sociologie politique) ainsi que sur des compétences et une expertise des trois marchés en réunissant des spécialistes de la banque et de la régulation financière et des économies informelles et criminelles. Cette combinaison unique permettra d’étudier par l’ethnographie la construction de la financiarisation et les façons dont elle réorganise les inégalités dans le cadre du capitalisme financier.

Avec ce projet, nous développerons les chaînes de dette en tant qu’outil méthodologique reproductible et concept théorique capable de capturer les complexités de la construction de la financiarisation et de la reconfiguration des relations sociales de la dette sous l’emprise de la financiarisation. Une telle entreprise nous permettra de construire une ethnographie comparative globale des chaines de dette.